Vous avez déjà vu ça : un nouveau logiciel déployé avec enthousiasme, censé révolutionner un process interne… et six mois plus tard, les équipes continuent à bricoler sur Excel ou à contourner l’outil.
Le problème n’est pas le logiciel. C’est le process qu’il digitalise. S’il est bancal à la base, la technologie ne fera que figer ses défauts.
Alors, avant d’ajouter un énième outil au parc applicatif, posez-vous les bonnes questions :
- Vos équipes perdent-elles vraiment du temps à cause de l’outil, ou à cause du process ?
- Quelles étapes sont inutiles, répétitives ou contournées en douce ?
- Où sont les vrais blocages qui ralentissent la production ?
Sans ce diagnostic, vous risquez de digitaliser un problème… et non de le résoudre. Voyons comment éviter ce piège.
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Votre logiciel sera-t-il adopté… ou contourné comme les précédents ?
Un logiciel mal cadré ne corrige pas un process bancal, il le fige.
Trop d’entreprises digitalisent à l’aveugle, pensant que l’outil suffira à améliorer le travail. Et les résultats sont souvent les mêmes :
- Un ERP qui impose 10 écrans pour une tâche simple.
- Une validation qui prend 3 jours au lieu de 3 clics.
- Des saisies répétées dans trois systèmes non connectés.
Conséquence ? L’adoption est catastrophique. Les équipes retournent sur Excel, emails et solutions maison, et l’IT se retrouve avec un logiciel fantôme de plus à maintenir.
👉 Décryptons les 5 principales raisons pour lesquelles ces projets échouent avant même leur lancement.
Raison n°1 : Le process que vous digitalisez est-il vraiment le bon ?
Les équipes vous disent : "Notre outil est obsolète, remplaçons-le."
Mais vous devez vous demander : "Pourquoi nos équipes perdent du temps ? D’où vient vraiment le blocage ?"
Trop souvent, on part du postulat que l’outil est le problème. Mais et si le problème venait du process lui-même ?
Exemples concrets :
- Un workflow avec trop d’étapes inutiles.
- Des validations bloquantes qui ralentissent tout.
- Une organisation du travail mal pensée, qui oblige les équipes à contourner le système.
👉 Avant de développer une nouvelle solution, posez-vous la question : l’outil actuel est-il vraiment dépassé, ou simplement mal utilisé ?
Raison n°2 : Vos équipes trouvent le process lourd… mais où sont les preuves ?
"On perd trop de temps.”
"C’est trop compliqué"
Vous avez sûrement entendu ces plaintes. Mais quelles sont les vraies données derrière ?
Les bonnes questions à se poser :
- Combien de temps vos équipes passent-elles réellement sur chaque tâche ?
- Où sont les blocages qui freinent la production ?
- Quelle part du travail est contournée via Excel, emails ou solutions maison ?
👉 Sans ces réponses, impossible de prioriser les bons sujets. Et vous risquez de digitaliser un problème qui n’existe pas vraiment.
Raison n°3 : Faut-il tout refaire de zéro ou améliorer l’existant ?
La tentation est forte de repartir de zéro. Mais est-ce vraiment nécessaire ?
Dans bien des cas, 90% des besoins sont déjà couverts par l’outil actuel. Le problème ? Il est mal exploité.
Ergonomie bancale, manque d’intégration avec d’autres solutions, fonctionnalités sous-utilisées… Ce sont ces irritants qu’il faut traiter avant d’envisager un remplacement total.
📌 Le risque d’une refonte totale ?
- Un projet long, coûteux et risqué.
- Une transition brutale qui perturbe les équipes.
- Une nouvelle solution… qui sera contournée si elle ne corrige pas les vrais irritants.
👉 Posez-vous la question : L’outil est-il réellement dépassé, ou simplement mal exploité ?
Raison n°4 : Si vos équipes n’utilisent pas l’outil actuel, pourquoi adopteraient-elles le nouveau ?
Si vos équipes ont abandonné l’ancien outil, ce n’est pas juste une question d’interface ou de formation. C’est qu’il ne leur facilitait pas la vie.
Trop rigide, trop éloigné des contraintes terrain, trop de clics pour une simple action… Résultat ? Elles ont trouvé mieux ailleurs : Excel, WhatsApp, emails.
Deux approches s’opposent :
❌ Croire qu’un outil avec une nouvelle UI fera la différence.
✅ Comprendre pourquoi l’ancien a été contourné et intégrer ces contraintes dans la nouvelle solution.
👉 Un bon logiciel n’est pas celui qui a le plus de fonctionnalités. C’est celui que vos équipes veulent utiliser.
Raison n°5 : Chaque service a une vision différente du problème : comment aligner tout le monde ?
Dans un projet de digitalisation, chaque équipe tire dans sa direction :
- L’IT veut une architecture scalable et sécurisée.
- Les métiers veulent un outil simple et rapide à utiliser.
- La finance veut limiter les coûts et éviter un projet trop ambitieux.
Si chacun défend sa vision sans un cadre clair, le projet devient un compromis mou qui ne satisfait personne et qui finira par être abandonné.
👉 Seule une cartographie précise des workflows peut aligner IT, Métiers et Finance pour s’assurer que l’investissement répond à un vrai besoin business.
3 étapes pour analyser le travail de vos équipes
Vous avez identifié un problème. Mais êtes-vous sûr d’avoir bien cerné l’enjeu ? Trop souvent, la digitalisation est vue comme une réponse miracle, alors qu’elle ne fait que reproduire – voire amplifier – les dysfonctionnements existants.
Un projet bien cadré commence toujours par une phase d’analyse fine. Comment vos équipes travaillent-elles réellement ? Quels sont les blocages concrets ? Où sont les pertes de temps, les frustrations, les inefficacités ?
Avant d’envisager une solution, posez un diagnostic précis. On vous donne la méthode step by step.
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Étape n°1 : aligner IT, Métiers et Finance avant de lancer le projet
Ne tombez pas dans le piège d’identifier un point de friction et de chercher immédiatement un nouvel outil, sans interroger la structure même du process.
Identifier les parties prenantes et leurs enjeux
Dans un projet de digitalisation, trois groupes d’acteurs ont généralement des attentes différentes :
- Les opérationnels : ce sont eux qui appliquent le process sur le terrain. Leur priorité ? Travailler efficacement sans contraintes inutiles.
- Les responsables métiers : ils supervisent l’activité et sont garants de la qualité et de la performance. Ils cherchent à standardiser les pratiques et à éviter les pertes de temps.
- La DSI et le support IT : ils doivent garantir la compatibilité des outils et leur sécurité. Leur objectif : une solution stable, évolutive et intégrée au SI existant.
- La finance et la direction : elles veillent au budget et au ROI. Leur enjeu ? Éviter un projet trop ambitieux qui explose les coûts, mais aussi un sous-investissement qui génère des dépenses cachées.
Si vous concevez une solution sans inclure ces trois groupes, vous risquez un projet en décalage avec la réalité. Une solution pensée uniquement par l’IT sera perçue comme un carcan par les métiers. Et une solution métier sans cadrage IT créera une dette technique difficile à gérer.
Comprendre comment le travail est réellement effectué
Sur le papier, un process semble clair. Mais dans la pratique, les équipes terrain l’adaptent constamment pour contourner ses défauts.
Pour analyser un process, il ne suffit pas d’interroger les managers. Il faut aller voir sur le terrain. Plusieurs méthodes :
- Observation terrain (shadowing) : suivez les équipes en situation réelle pour voir où se situent les blocages.
- Interviews des opérationnels : appréhendez leurs contraintes et leurs habitudes de travail.
- Audit des outils utilisés : identifiez les écarts entre les usages prévus et les usages réels.
Étape n°2 : identifier les vrais irritants (et pas juste les symptômes visibles)
Un workflow peut sembler logique sur le papier, mais être un enfer pour ceux qui l’utilisent. Avant d’apporter une solution, il faut comprendre ce qui coince concrètement.
Comprendre où se situe la perte de temps
On entend souvent : "Le logiciel est lent", "On perd trop de temps sur cette tâche"... Mais ces constats vagues n’aident pas à agir. Il faut aller plus loin :
- Quelles étapes du workflow prennent anormalement du temps ?
- Où les équipes créent-elles des solutions alternatives pour contourner les blocages ?
- À quel moment les outils deviennent-ils un frein plutôt qu’un soutien ?
Un bon indicateur : si les équipes utilisent Excel, des emails ou WhatsApp en parallèle de l’outil officiel, c’est qu’un problème structurel existe. Le but est de repérer ces détours et comprendre pourquoi ils sont jugés plus efficaces que le système en place.
Aller sur le terrain pour identifier les irritants
Les problèmes les plus critiques ne se trouvent pas dans un fichier de specs ou une analyse théorique. Ils apparaissent dans l’usage quotidien. Pour les identifier, il faut consulter ceux qui vivent ces process :
- Les responsables métiers, qui ont une vision globale et peuvent détecter les goulets d’étranglement.
- Les utilisateurs, qui subissent les lenteurs, les doublons et les contraintes inutiles.
- Le support IT, qui voit remonter les plaintes récurrentes et repère les problèmes techniques à l’origine de certains blocages.
Objectiver les irritants pour mieux prioriser
Une fois ces problèmes identifiés, il faut mesurer leur impact. Sans chiffres, impossible de prioriser les bons sujets. Plusieurs méthodes permettent d’objectiver ces irritants :
- Ateliers de friction : regroupez plusieurs équipes et cartographiez ensemble les irritants concrets qu’elles rencontrent.
- Analyse des tickets support : repérez les plaintes récurrentes pour identifier les dysfonctionnements les plus fréquents.
- Observations terrain : suivez les utilisateurs dans leur quotidien pour détecter les contournements et blocages réels.
L’idée n’est pas de tout optimiser, mais d’éliminer les ralentisseurs inutiles.
Étape n°3 : cartographier les usages réels (et pas ceux sur le papier)
Sans cartographie précise des workflows, impossible de comprendre où se perdent les infos, où les équipes contournent le système et pourquoi.
Alors, comment travaillent réellement vos équipes ?
Démêler les vraies étapes du process
Un workflow ne suit jamais la ligne droite imaginée dans un cahier des charges. Dans la vraie vie, des raccourcis sont pris, des étapes sont sautées, des solutions alternatives émergent.
Un exemple classique : une demande de validation qui, sur le papier, passe par un outil dédié. Sauf que dans la réalité, un coup de fil ou un message WhatsApp accélèrent la procédure. Le problème ? L’information n’est ni tracée, ni structurée.
Comment cartographier le process réel ?
- Observation terrain (shadowing) : passez une journée avec les équipes et regardez comment elles exécutent réellement le process.
- Entretiens avec les métiers : demandez-leur où ils perdent du temps, quelles étapes ils contournent et pourquoi.
- Audit des outils utilisés : vérifiez où l’information transite, si elle est dupliquée et comment elle est saisie. Un ERP peut être utilisé comme simple base documentaire au lieu d’être un véritable outil métier.
Comprendre comment circulent les informations
Quand les équipes passent leur temps à jongler entre plusieurs logiciels, à recopier des informations d’un tableau Excel à un CRM ou à refaire trois fois la même saisie, ce n’est pas un manque de formation, c’est un signal d’alerte.
Ce sont ces points de friction qu’il faut repérer avant de digitaliser. Où les infos sont ressaisies inutilement ? Où les échanges passent en "off" pour gagner du temps ? Où les outils ralentissent le travail au lieu de le fluidifier ?
Comment analyser la circulation des informations ?
- Cartographie des flux IT : analysez comment les outils interagissent entre eux et identifiez les doublons.
- Tracking des tâches : mesurez le temps passé à chaque étape pour repérer les goulets d’étranglement.
- Analyse des logs et des tickets IT : repérez les plaintes récurrentes et les points de friction les plus signalés.
Repérer les blocages invisibles
Un workflow ne bloque pas toujours là où on l’attend. Parfois, un simple mail en attente d’une réponse devient le goulet d’étranglement de toute une chaîne de production.
C’est souvent là que le temps se perd : des étapes de validation trop longues, des transferts d’infos non automatisés, des doublons…
Comment identifier ces blocages ?
- Diagramme BPMN : formalisez les flux et visualisez les étapes superflues ou redondantes.
- Validation métiers : présentez la cartographie aux équipes terrain et ajustez selon leurs retours.
- Tests de simulation : expérimentez différents scénarios pour voir où le workflow coince réellement.
Étude de cas : pourquoi un logiciel métier peut échouer si les usages sont mal compris (et comment l’éviter)
Un acteur majeur du BTP déploie un nouvel outil pour structurer ses rapports de contrôle sur chantier. Ses objectifs : gagner en traçabilité, accélérer la transmission des données, sécuriser la conformité réglementaire.
Sur le papier, le logiciel devait standardiser les rapports. En réalité, il a ajouté de la complexité et personne ne l’a adopté.
On a mené un travail de fond pour comprendre où le projet avait déraillé et comment reconstruire un process digital réellement adapté aux usages terrain.
Comprendre le vrai problème
Dès l’observation terrain, une évidence : un manque total de cadre pour standardiser les documents. Le problème ne vient pas du logiciel, mais d’un process inexistant.
Chaque consultant perdait en moyenne 1h/jour à structurer ses rapports à sa façon. Word, Excel, modèles hérités… aucun standard, aucune homogénéité. L’outil officiel ? Utilisé uniquement pour générer un PDF final. Et encore, quand il n’était pas oublié. Les champs obligatoires ? Parfois ignorés, faute de règles claires.
Identifier les irritants
L’outil en place était censé structurer et fluidifier la gestion des rapports. En réalité, il imposait aux consultants un formalisme rigide, une navigation lourde et trop de saisies inutiles. Au lieu d’aider, il freinait.
Les irritants majeurs qu’on a identifiés :
- Un temps de saisie trop long : jusqu’à 1h pour rédiger un rapport, entre prise de notes sur site et mise en page.
- Trop d’étapes inutiles : chaque champ était obligatoire, même ceux non pertinents selon la mission.
- Une ergonomie inadaptée au terrain : trop de clics, une interface pensée pour le bureau, pas pour le mobile.
Cartographier le flux de travail réel
En cartographiant tout le cycle de rédaction des rapports, une faille majeure est apparue : il n’y avait aucune distinction entre les différents types de contrôles réalisés par les consultants (conception vs exécution).
Le logiciel imposait un format unique pour toutes les missions, sans tenir compte des spécificités de ces deux phases. Conséquences :
- Un process rigide qui ne reflétait pas les méthodes de travail terrain.
- Des contournements systématiques pour s’adapter aux spécificités de chaque chantier.
- Une traçabilité compromise avec des rapports dispersés et non standardisés.
Il fallait revoir la logique de travail en profondeur : adapter les modèles de rapports aux différents types de contrôle et, surtout, simplifier la saisie pour que les consultants passent moins de temps sur la forme.
"Avant, on développait trop vite et on se retrouvait avec un outil inutilisé. En prenant le temps d’analyser les vrais irritants, on a évité de refaire les mêmes erreurs. Cette approche a aligné IT, consultants et direction technique, ce qui a facilité l’adoption et sécurisé la conformité des rapports."
La leçon : un logiciel n’est qu’un outil, le vrai enjeu c’est l’usage
L’erreur aurait été de croire qu’un nouveau logiciel allait résoudre un problème d’organisation. On aurait pu repartir sur une refonte technique, avec une interface plus fluide, des fonctionnalités enrichies… mais en laissant intactes les vraies causes du dysfonctionnement.
Le constat était simple : le logiciel précédent avait été conçu pour répondre aux attentes de la direction, pas aux besoins du terrain. Résultat ? Un outil contourné, des process éclatés et une perte de traçabilité.
Le levier d’optimisation ne se trouvait pas dans la technologie, mais dans une refonte des usages : distinguer les types de contrôle, simplifier la saisie, intégrer les contraintes des consultants.
Vous voulez éviter l’échec d’adoption lors du développement de votre logiciel ? On peut vous à cartographier vos process, identifier les vrais irritants et construire une solution pensée pour être utilisée – pas contournée.